Antony Doria, commençons cette interview avec quelques mots à propos de toi. Pourrais-tu te présenter en quelques mots ?
Aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours eu une sensibilité particulière pour la musique. J’ai comme beaucoup de monde fréquenté certains clubs, mais c’est en entrant pour la première fois au Fuse en 1998 que j’ai su ce que je voulais faire.
Alors la question peut paraître simple mais pourquoi fais-tu de la musique ?
Question simple pour une réponse simple. L’échange et le partage des émotions.
Sur ton profil Instagram, on peut voir ton adresse personnelle pour te contacter en cas de booking. Y a-t-il une raison particulière pour laquelle tu préfères gérer cet aspect lié à ton métier de DJ ?
Ce n’est pas un choix, mais une fatalité. A notre époque, faire de la musique ne suffit plus, être collaborateur avec une agence de booking est malheureusement un défi énorme.
L’année dernière, on t’a vu sur les affiches du Fuse à deux reprises dont une avec Phara & Border One, Altinbas et Downside. Peux-tu nous en dire plus sur ta collaboration avec le Fuse ?
J’ai eu la chance de rencontrer Marco Bailey par le biais de mon ami Eric Frère alias Xentrix. Marco aimait beaucoup ce que je produisais, il m’a dit, “fais moi un EP, et tu seras à la prochaine Materia”. Chance pour moi, la suivante était au Fuse. J’ai par la suite rencontré le directeur artistique du Fuse ainsi que les résidents. Ils ont aimé le style et l’énergie de mon set, j’ai donc eu la chance d’y être invité une seconde fois.
Becoming Aware Of Things, tel est le nom de l’EP que tu as droppé sur le label Symbolism de Ben Sims. Quel honneur de pouvoir te compter parmi le hall of fame du label. Peux-tu nous raconter comment les choses se sont mises en place pour déboucher sur une publication de tes tracks ?
Dans un premier temps j’ai eu la chance de sortir un single sur le label de Ben Sims. J’ai ensuite travaillé beaucoup pour sortir un EP sur son label. C’est en effet l’une de mes plus grandes fiertés.
En plus de l’EP, tu as également eu le plaisir de pouvoir enregistrer un mix pour la série Hardgroove Mixtape de Ben Sims. Le mix est une vraie tuerie avec une superbe sélection de tracks bien rythmées et darks. Comment t’y prends-tu pour préparer un tel mix ?
Je sélectionne surtout les tracks que j’aime, ceux qui ont le plus d'énergie. J’aime les tracks musclés qui se prêtent au mix de manière à faire bouger le public et remuer le ventre.
Revenons-en à l’aspect production. Tu nous as fait part du fait qu’actuellement tu avais mis la production de tracks techno de côté pour te consacrer à un autre style. Pourrais-tu nous dire pourquoi tu as pris cette décision ? et également nous faire part de ton nouveau projet ?
Comme expliqué précédemment, la musique ne suffit plus dans la scène techno. Un nombre incalculable de personnes font le tour d’Europe, voir du monde juste avec des followers. Cela n’est pas du tout ma vision des choses. La musique vient du cœur et pas uniquement d’une stratégie marketing. Peu importe le style, j’ai besoin de partager mes émotions et ma musique. Quand quelqu’un m'invite, je lui demande toujours pourquoi il m'invite et ce n’est pas pour une fausse célébrité sur les réseaux.
En ce qui concerne mon nouveau projet, il n’est pas si nouveau. Je l’avais mis de coté pour me consacrer à la techno. Je retourne donc vers un autre amour.
Fan inconditionnel de Nine Inch Nails, j’ai toujours eu envie de faire quelque chose dans cette direction musicale. Je cite un génie, dur d’être à la hauteur, mais cela me fait un bien fou au studio.
Si tu devais citer quelques artistes qui, selon toi, produisent de la bonne techno, à qui penses-tu et pourquoi ?
Malgré tous ces points négatifs, quelques artistes arrivent encore à percer pour leur musique, ce qui me donne un peu d'espoir pour le futur. Je pense à Temudo, Norbak par exemple. Pour moi les deux meilleurs producteurs actuels.
Lors d’une discussion au préalable, tu nous as fait part du fait que tu ne voyais pas d’un bon œil la scène électronique actuelle. Est-ce que tu pourrais partager ton opinion ici ?
Tout est basé sur les réseaux et non plus sur l'artistique. On se fout pas mal de savoir ce que tu as fait, juste ce que tu es et ce que tu peux rapporter. De plus, il est extrêmement facile de mixer et tout le monde peut le faire. Plus grand monde ne fait attention à la technique, mais juste au buzz ou autre connerie. Je pense que le djing est mort malheureusement. Créer quelque chose n’a plus d'importance dans ce milieu et cela est bien triste.
Si on te demandait de raconter l’anecdote du moment le plus farfelu que tu as vécu en milieu électronique, lequel serait-ce ?
Farfelu non, mais drôle oui. J’étais en Estonie, un accueil incroyable avec des jeunes passionnés. Après un dîner bien chargé, je me suis retrouvé à goûter à tous les alcools du pays. J’ai fini par me cacher derrière le rideau de la scène afin de pouvoir assurer le mix.
Pour aller un pas plus loin, nous avons discuté de musique immersive. Ce concept novateur n’est sans doute pas encore connu du grand public. Toi qui touche à cette dimension, est-ce que tu pourrais nous expliquer en quoi cela consiste ? et par la même occasion nous faire part de ton expérience ?
En gros, il s’agit du même procédé que l’on trouve dans les salles de cinéma. Cette technique donne une nouvelle dimension à ta musique en live. Cela demande une préparation en amont, mais après tu peux amener le public en dirigeant le son en fonction de ta musique, chose impossible avec de la stéréo.
Quand tu ne fais pas de musique, que fais-tu ?
Ma famille, mes amis bien sûr. J’aime les vieux films et sans cesse écouter de la musique.
Et pour clôturer cette interview, y a-t-il quelque chose que tu voudrais rajouter ?
Simplement, merci de m’avoir interviewé et écouté !